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Abattage halal sans étourdissement de l’animal : pas de label « agriculture biologique »

Environnement & qualité - Qualité, Environnement
Public - Environnement
28/02/2019
Le logo de production biologique européen ne peut être apposé sur les viandes issues de l’abattage rituel sans étourdissement préalable, une telle pratique ne respectant pas les normes de bien-être animal, a jugé la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) le 26 février 2019.
Une association de défense des animaux destinés à la consommation (l’Œuvre d’assistance aux bêtes d’abattoirs, OABA) avait demandé en 2012 au ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation de faire interdire la mention « agriculture biologique » (AB) sur des publicités et emballages de steaks hachés de bœuf certifiés « halal » issus d’animaux abattus sans étourdissement préalable. Elle affirmait en effet que « la mention « AB » ne saurait être apposée sur les produits issus d’animaux abattus sans étourdissement préalable, une telle méthode d’abattage ne répondant pas à l’exigence de « normes élevées en matière de bien-être animal », posée par les articles 3 et 5 du règlement n° 834/2007 ».

L’organisme certificateur concerné (Ecocert), puis le tribunal administratif de Montreuil, ont rejeté la demande de l’OABA. La cour administrative d’appel de Versaillesa pour sa part décidé de poser une question préjudicielle à la Cour de justice, afin de savoir si le droit de l’Union autorise la délivrance du label européen « AB » à des produits issus d’animaux ayant fait l’objet d’un abattage rituel sans étourdissement préalable, conduit dans les conditions fixées par le règlement n° 1099/2009.
 
Le logo biologique en question dans cette décision est celui visé à l’article 25 du règlement n° 834/2007 (Règl. (CE) n° 834/2007, 28 juin 2007, JOUE 20 juill., n° L 189/1), relatif à la production biologique et à l'étiquetage des produits biologiques, et de l’article 57 du règlement n° 889/2008 (Règl. (CE) n° 889/2008, 5 sept. 2008, JOUE 18 sept., n° L 250/1) portant modalités d’application du règlement n° 834/2007.
La cour examine la question sous l’angle des articles 3 et 14, paragraphe 1, sous b), viii), du règlement n° 834/2007 précité, lu à la lumière de l’article 13 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), en vertu duquel « lorsqu'ils formulent et mettent en œuvre la politique de l'Union dans les domaines de l'agriculture, de la pêche, des transports, du marché intérieur, de la recherche et développement technologique et de l'espace, l'Union et les États membres tiennent pleinement compte des exigences du bien-être des animaux en tant qu'êtres sensibles, tout en respectant les dispositions législatives ou administratives et les usages des États membres en matière notamment de rites religieux, de traditions culturelles et de patrimoines régionaux ».

La cour rappelle, à titre liminaire, les règles applicables. Elle affirme que le législateur de l’Union, dans les règlements en cause, a souligné « à plusieurs reprises sa volonté d’assurer un niveau élevé de bien-être animal dans le cadre de l’agriculture biologique ». Cela se traduit par « l’observation de normes renforcées en matière de bien-être animal dans tous les lieux et à tous les stades de cette production », notamment dans la phase de « préparation », énoncée à l’article 1er, paragraphe 3 sur règlement n° 834/2007 du 28 juin 2007, qui inclut l’abattage, en vertu de l’article 2, i, du même règlement.

Pour la cour, « le principe de l’étourdissement de l’animal préalablement à sa mise à mort », a été érigé en obligation par l’article 4, paragraphe 1 du règlement n° 1099/2009 (Règl. (CE) n° 1099/2009, 24 sept. 2009, JOUE 18 nov., n° L 303/1) sur la protection des animaux au moment de leur mise à mort, lu en combinaison avec le considérant 20 de ce règlement. Une dérogation à ce principe est toutefois concédée dans ce même article, au paragraphe 4, pour « la pratique de l’abattage rituel », mais uniquement dans le but « d’assurer le respect de la liberté de religion » (cf. CJUE, 29 mai 2018, aff. C-426/16, Liga van Moskeeën en Islamitische Organisaties Provincie Antwerpen e.a. c/ Vlaams Gewest, points 55 à 57  ; v. Conditions de régularité des abattages rituels sans étourdissement, Actualités du droit, 31 mai 2018).

Toutefois, la cour retient que cette pratique, bien qu’autorisée, n’atténue pas « toute douleur, détresse ou souffrance de l’animal aussi efficacement qu’un abattage précédé d’un étourdissement » et n’est donc pas équivalente « en termes de garantie d’un niveau élevé de bien-être de l’animal au moment de sa mise à mort, à la méthode d’abattage avec étourdissement préalable ».

En outre, la cour rappelle que « préserver et justifier la confiance des consommateurs dans les produits étiquetés en tant que produits biologiques » est l’un des objectifs de l’Union au titre duquel il convient de veiller à ce que les consommateurs aient l’assurance du respect du « respect des normes les plus élevées, notamment en matière de bien-être animal » lorsqu’ils achètent des produits porteurs du logo biologique de l’Union.

La cour estime, par conséquent, que les règles du droit de l’Union n’autorisent pas l’apposition du logo de production biologique sur des produits issus d’animaux ayant fait l’objet d’un abattage rituel sans étourdissement préalable.
Source : Actualités du droit