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La semaine du droit de l’environnement

Environnement & qualité - Environnement
04/10/2021
Présentation des dispositifs des arrêts publiés au Bulletin civil de la Cour de cassation, en droit de l’environnement, la semaine du 27 septembre 2021.
Clause de pollution – responsabilité contractuelle
« Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, chambre d'appel de Mamoudzou, 4 février 2020), le 29 mars 2010, la société Total Mayotte a échangé avec la société Nel une parcelle de terrain sur laquelle elle avait exploité une station-service de distribution de carburants de 2004 à 2010, l'acte contenant une « clause de pollution ».
Le 31 mai 2010, la société Nel a revendu la parcelle à la société Station Kaweni, qui l'a donnée à bail à la société Sodifram pour y édifier des parkings, commerces et bureaux.
En octobre 2013, à l'occasion de travaux d'aménagement et de terrassement, une pollution aux hydrocarbures a été découverte sur ce terrain.
Les sociétés Station Kaweni et Sodifram ont assigné les vendeurs successifs en indemnisation de leurs préjudices pour non-respect des articles L. 512-12-1 et R. 512-66-1 du Code de l'environnement, manquement à leur obligation de délivrance conforme et garantie des vices cachés.
La société Total Mayotte a formé un appel en garantie contre la société Nel.

 
La cour d'appel a énoncé à bon droit que le sous-acquéreur jouit de tous les droits et actions attachés à la chose qui appartenait à son auteur et dispose à cet effet contre le vendeur initial d'une action contractuelle directe fondée sur la non-conformité de la chose livrée.
Elle a relevé qu'à la « clause de pollution » de l'acte d'échange du 29 mars 2010 ayant pour but d'exonérer la société Total Mayotte de tout recours de l'acquéreur en raison de l'état du sol et du sous-sol de l'immeuble « pouvant être imputable à l'activité précédemment exercée sur ce dernier » était joint un rapport de synthèse de dépollution du 8 avril 2008.
Elle a constaté que la présence de reflets moirés et une forte odeur d'hydrocarbures étaient apparues « au premier coup de godet », signe d'un travail de dépollution pour le moins superficiel ayant conduit le maître d'oeuvre à suspendre immédiatement les travaux, qu'un arrêté préfectoral du 24 décembre 2013 avait intimé à la société Total Mayotte l'ordre de remettre le site de l'ancienne station-service dans l'état tel qu'il ne puisse porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du Code de l'environnement relatif aux installations classées pour la protection de l'environnement et que la société Total Mayotte avait elle-même anticipé cette décision administrative dès le 16 décembre 2013.
N'ayant pas constaté l'acceptation, par l'acquéreur, d'un risque connu de pollution résiduelle, mais retenu que le rapport technique joint à l'acte d'échange accréditait l'idée d'une dépollution complète du site, ce qui était loin d'être le cas, la cour d'appel a pu déduire de ces seuls motifs, dès lors que le bien n'était pas conforme à cette caractéristique, que la société Total Mayotte avait manqué à son obligation de délivrance et qu'il y avait lieu de retenir sa responsabilité contractuelle envers la société Station Kaweni, sous-acquéreur, et délictuelle envers la société Sodifram.
Le moyen n'est donc pas fondé.

 
Vu les articles 1603, 1604 et 1641 du Code civil :
Il résulte des deux premiers de ces textes que le vendeur a l'obligation de délivrer une chose conforme à celle promise.
Selon le troisième, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en n'aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.
Pour juger que la société Nel n'avait pas satisfait à son obligation de délivrance conforme, l'arrêt retient que la parcelle que la société Station Kaweni destinait à la construction de parkings, commerces et bureaux s'est trouvée inconstructible pendant six mois en raison de la présence d'hydrocarbures imputable au manquement de la société Total Mayotte à son obligation de délivrance, à la société Nel, d'un terrain dépollué.
En statuant ainsi, alors que la clause de pollution n'avait pas été reprise dans l'acte de la vente conclue entre les sociétés Nel et Station Kaweni et que l'inconstructibilité du terrain constituait non un défaut de conformité, mais un vice caché de la chose vendue, la cour d'appel a violé les textes susvisés 
».
Cass. 3ème civ., 30 sept. 2021, n° 20-15.354, FS-B *
 

* Le lien vers la référence documentaire sera actif à partir du 4 novembre 2021
 
Source : Actualités du droit